Décroissance et Ecosocialisme

Dans le cadre de sa participation aux assises pour l’écosocialisme du 1er décembre 2012, voici la contribution du PPLD

Il y a de nombreuses formes d’écosocialisme, celle-ci entend faire une synthèse entre la décroissance et celle du socialisme autogestionnaire. La Décroissance écosocialiste repose ainsi, sur 4 piliers :

Le 1er pilier : La révolution culturelle de l’objection de croissance, opposée au productivisme. Sans la prise en compte du paradigme de la Décroissance, le socialisme aboutira à renouer avec un productivisme sans fin. Or, nous sommes limités par les ressources non renouvelables, tel le pétrole ou les métaux, qui seront pour la majorité épuisés d’ici 30 à 80 ans. L’objection de croissance écosocialiste propose en premier lieu la décroissance des inégalités, afin de permettre l’émancipation des plus pauvres, au moins jusqu’à hauteur d’une empreinte écologique[1][1] soutenable pour tous. De même, notre projet de Décroissance soutient les secteurs n’ayant qu’un faible impact sur les ressources non renouvelable, tel que les services publics dans le social, la culture et la santé.

Ce changement de paradigme suppose de passer, de la modernité du capitalisme techno-industrielle, à la postmodernité de la Décroissance écosocialiste autogestionnaire. Ce qui implique de partager des richesses économiques et naturelles, qui sont limitées. Ce qui suppose, le passage de la recherche du pouvoir, de la prédation de l’homme sur ses semblables et sur la nature (dont il est généralement coupé), vers la recherche de l’harmonie entre l’être humain et la Nature. Cela requiert enfin, de passer de la recherche de la vitesse et du productivisme matériel, vers la quête de la sobriété heureuse, soutenable et respectueuse des biens non renouvelables.

 

Le 2e pilier : l’autogestion de la propriété collective des moyens de production opposée à la propriété privée des moyens de production du capitalisme. Ce dernier, n’est pas la fin de l’histoire et il est possible d’échapper à la voie mortifère de la pensée unique. L’autogestion des entreprises, n’est pas une utopie. Il existe des milliers d’expériences réussies. Par exemple, en Espagne, la coopérative Mandragon est une fédération de coopératives qui connaît une réussite spectaculaire, puisqu’elle figurait parmi les 7 premières entreprises du pays en chiffre d’affaires en 2011. Elle existe depuis 1956, à Mondragon en Espagne. En 2009, elle comptait plus de 85 000 membres.

Ce qui caractérise le capitalisme, c’est principalement la propriété privée des moyens de production, limitée à une partie des membres. Cela permet à l’employeur, d’asseoir son pouvoir sur les salariés. De plus, les dirigeants des transnationales disposent d’un pouvoir d’influence économique déterminant sur les élites politiques, qui est renforcé par des intérêts de classe. La véritable démocratie, suppose donc au préalable, une démocratie économique fondée sur la propriété collective des moyens de production, qui permet l’autogestion. Les coopératives privées sont une propriété privée collective et les nationalisations une propriété publique collective d’Etat. Cependant, la socialisation est de même nature que la nationalisation, mais elle est préférable, car elle y ajoute l’autogestion de la production, qui est plus démocratique.

Mais rechercher une décroissance capitaliste sans une appropriation collective et démocratique des moyens de production des grandes entreprises sera impossible car les dirigeants des transnationales privées qui détiennent le pouvoir sur les élites politiques s’y opposeront.

 

Le 3e pilier : La démocratisation de l’économique et du politique, du plan local au plan international, s’opposant à la gouvernance globale libérale par les entreprises privées.

Sans la prise en compte de la dimension démocratique de l’économique et du politique, une régulation écologique et sociale peut conduire vers l’écofascisme et l’écototalitarisme. Il est donc nécessaire de développer une régulation fédéraliste autogestionnaire qui peut s’inspirer du modèle de Michael Albert, grâce à une planification mixte avec le marché et non un fédéralisme centralisé, qui se rapproche du fonctionnement d’un Etat centralisé.

Cette relocalisation ouverte permettra de réaliser une planification écologique fondée sur la démocratie participative. La planification serait donc participative, autogestionnaire et tripartite, ce serait une planification fédéraliste autogestionnaire. Il s’agit d’une réappropriation démocratique qui permettra de décider collectivement : qu’est-ce que l’on produit ? Comment le produit-on ensemble (partage des tâches difficiles) ? Pour quel usage ?

 

Le 4e pilier : Une régulation de l’économie et du marché : La limitation des revenus, la redistribution des richesses et la protection des biens communs, en opposition à la dérégulation du marché conduisant à l’accumulation capitaliste illimitée. La Décroissance écosocialiste vise à concilier la liberté et l’égalité, grâce à quatre facteurs qui permettent une régulation équilibrée :

a- Une liberté d’initiative des producteurs et des consommateurs perdure grâce à l’existence d’un marché écosocialiste fortement régulé. Cette régulation s’appuiera sur des incitations financière, telles des taxes. Lorsque ce n’est pas suffisant, il faudra y ajouter des fourchettes minimums et maximums de prix et des quotas (de production, de gratuité…) quand ceux-ci dépassent les normes d’équité. Dans l’écosocialisme distributif, parallèlement à la planification, il y a toujours un marché afin d’éviter les dérives du bureaucratisme pyramidale et centralisateur. Il y a toujours une interaction entre l’offre (la production) et la demande (la consommation), mais elles sont toutes deux régulées par un système fédéraliste autogestionnaire qui permet d’éviter la situation de domination des plus puissants sur un marché capitaliste non régulé.

b- Une redistribution des richesses est nécessaire, car une décroissance sans politique sociale de redistribution des richesses conduit à une décroissance néolibérale, dans laquelle les plus pauvres décroissent, tandis que les plus riches conservent leurs capacités de consommation, en conservant la capacité à s’acheter les ressources non renouvelables, même lorsque leurs prix augmentent fortement. La redistribution des richesses pour les coopératives et les individus permet d’accroître l’égalité, la solidarité, d’éviter les trop grands écarts de richesses économiques et de créer une plus grande égalité entre les acteurs de l’offre et de la demande, qui est le fondement de l’émulation efficace. En effet, certaines coopératives, plus compétitives peuvent s’enrichir beaucoup plus que d’autres. Ce qui recréerait des inégalités, or la décroissance écosocialiste vise justement à éviter cette dérive.

c- L’encadrement des revenus (salaire plus revenu financier, ou revenu inconditionnel) limite inégalité et l’accumulation. Avant même la sortie du système capitaliste, l’instauration d’un revenu minimum, mais surtout d’un revenu maximum, permettrait déjà de diminuer les dérives du capitalisme, fondée sur l’accumulation et le pouvoir qui en résulte. Pour assurer le partage des revenus du travail, le partage du travail (le passage aux 32 heures dans un premier temps) représente aussi un des facteurs clés.

d- Chaque être humain pourrait disposer aussi d’une Dotation Inconditionnelle d’Autonomie (DIA)[2]. Cette dotation pourra être attribuée sous forme de revenu d’existence, d’accès à des services publiques (santé, éducation), de droit de tirage (eau, énergie) et de monnaies alternatives fondantes (produits de première nécessité locaux et bio, services). Le « revenu d’existence », assure à chacun une certaine indépendance, pour satisfaire ses besoins essentiels. Même dans un système socialiste fondé sur la redistribution du travail et des richesses, il peut exister des périodes de chômage. En effet, aucun système économique, n’est parvenu jusqu’à présent à une parfaite allocation d’un travail pour tous.

La décroissance écosocialiste intègre les dimensions écologique, socialiste, autogestionnaire, redistributive et fédéraliste.

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[1] Pour William E. Rees (1999), un des pères de ce concept : « l’empreinte écologique est la surface correspondante de terre productive et d’écosystèmes aquatiques nécessaires pour la production des ressources utilisées et l’assimilation des déchets produits par une population définie à un niveau de vie spécifié, là où cette terre se trouve sur la planète ».

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