Il était un petit navire qui n’avait jamais, jamais navigué….et pourtant !

Sujet d’actualité dont se sont emparés tous les médias, le limogeage de Delphine Batho m’interpelle aussi. Il faut savoir que « limogeage » est un terme d’origine militaire, qui n’est pas un licenciement, mais l’éviction à effet immédiat d’un gêneur.

Un rapide passage en revue de quelques sources médiatiques et on peut entendre chez « CALVI » ces phrases dites par les invités « chroniques » : « On est dans une période où il faut faire des économies » – « Elle n’avait pas de sens politique, mais des convictions » – « Elle n’a jamais travaillé dans une entreprise ou un organisme », elle lit les dossiers » – « si elle se met en rupture avec le PS, elle n’est plus rien » – « Proglio obtient le prolongement de toutes ces centrales le jour où Delphine Batho est limogée » – « Vous qui avez dû manier la chose écologique », et par les mêmes, apprendre que Monsieur Ayrault se glorifie de ce que son gouvernement va proposer « un nouveau modèle de société », on se demande bien lequel.

Avec l’écologie, les secteurs qui subissent des restrictions budgétaires sont l’agriculture, la culture, l’éducation et la défense. On se demande où sont les priorités de ce gouvernement qui n’a de « socialiste » que le nom ?

Delphine Batho, spécialiste de la sécurité, même pas écologiste défend l’écologie car elle a pu apprendre certaines vérités en lisant les dossiers dont elle avait la charge. Tous les ministres ne les lisent-ils pas ?

Toutes ces remarques, alors que nous sommes au début du XXIème siècle, font écho à ce documentaire diffusé sur Arte « une nouvelle histoire de l’homme » où on peut entendre ceci : « l’homme moderne, homo sapiens, a tendance à trop solliciter son environnement, à le presser comme un citron ».

Au fur et à mesure de son expansion sur la Terre, il y a eu extinction de plusieurs espèces d’animaux, comme par exemple le lion des cavernes, ainsi que de beaucoup d’animaux de plus de 45 kg comme en Australie. De toutes les espèces, l’homme est le seul qui a surexploité son environnement et qui continue de plus belle, mais contrairement à l’Homo Sapiens préhistorique, il atteint cette fois-ci les limites terrestres.

N’est-il pas temps de faire une pause, pour réfléchir, Monsieur Hollande, qu’en pensez-vous ?

La rébellion de Delphine Batho, qui peut-être parce qu’elle a lu les dossiers, qu’elle était chargée d’étudier, faisant ainsi son travail, a pris conscience de la réalité, et a décidé de passer outre les conventions, et de dire franchement ce qu’elle pensait. Elle a désobéi, car elle n’a pas voulu se taire, ni en temps que femme, ni en tant que ministre de l’écologie, l’une comme l’autre « devraient » pourtant savoir se taire, semble-t-il. Est-ce là un signe de changement ?

En écologie et justice sociale, d’autres révoltes se poursuivent, sur tous les fronts, où la vérité a besoin de s’exprimer. Même si l’on considère que le capitalisme trouve ses propres limites en touchant celles de la planète, on oublie trop souvent qu’une autre limite s’annonce : celle de la patience des hommes…

Les citoyens engagés se rendent compte que la légèreté est de mise au sein des institutions. L’argent public si durement gagné est dilapidé dans des projets destructeurs. Les promoteurs industriels et lobbyistes savent le peu d’intérêt apporté aux dossiers par ceux qui sont chargés de les traiter.

Quand donc allez-vous ouvrir les yeux pour voir le monde réel,  ?

Partout ce ne sont que pillage et destruction. L’écologie, qui est « la science des conditions d’existence », devrait guider toutes les décisions, c’est une science transversale. Premier de tous les ministères, il devrait avoir le pouvoir de freiner cette boulimie dévastatrice, il devrait apporter la raison au milieu de la curie.

Peut-être Delphine Batho devenait-elle gênante, peut-être avançait-elle dans les dossiers ? Sa prise de position contre l’exploitation des gaz de schiste ne plaisait pas. Les marchés, le capital et la finance préfèrent votre ministre du redressement destructif qui veut bien voir des emplois là où il n’y a que du vent. Il n’a sûrement pas lu les dossiers, lui. Pourtant un simple citoyen qui consulte un dossier de ce type, se rend compte de toutes les incohérences.

Le lobbying est à l’oeuvre, puissant. Il lance en ce moment une offensive afin de rendre les gaz inoffensifs, faisant miroiter des emplois alors qu’une lecture attentive des dossiers montre bien qu’aucun emploi pérenne ne sera crée, mais que des terres seront saccagées, l’eau et l’air seront pollués, et que l’argent public servira encore une fois à essayer de réparer ce que nous n’avons pas voulu, les entreprises responsables et coupables ayant pris le large.

Grands et Petits Projets Inutiles Imposés qui vont de l’aéroport de Notre Dame des Landes, bébé en gestation de votre premier ministre, jusqu’au ènième rond-point en construction dans la ville voisine, ceci après la disparition d’une zone humide au profit d’un centre commercial, partout la destruction sous prétexte d’innovation et de compétitivité est à l’oeuvre.

C’est aussi un gaspillage de l’argent public, on a encore vu cela en Lorraine, avec le scandale du Skylander et celui des gaz de couche, si cher à votre ministre de la production destructrice, que la région s’apprête à financer. Heureusement que pour beaucoup, la prise de pouvoir n’est pas un préalable au changement de la société… Heureusement que de nombreuses expérimentations sont déjà en cours ici et ailleurs pour proposer d’autres pistes plus respectueuses  de notre planète pour vivre simplement ensemble.

« Dans son texte, « La Terre ne se meut pas », Edmund Husserl dit que « la Terre n’est pas une planète comme une autre. Elle est le sol originaire et insubtituable de notre ancrage corporel : pour nous, elle n’est donc pas en mouvement. » Selon Husserl, c’est l’oubli de cette relation primordiale du corps au sol qui le soutient qui constitue la « faute originelle » de la modernité scientifique. Il montre que la distance théorique que nous prenons avec la Terre lorsque nous imaginons qu’elle est une planète comme une autre risque d’ébranler un enracinement premier. De par notre histoire et nos représentations, nous sommes fondamentalement des êtres géo-centrés. Notre pensée n’est pas une pensée « hors-sol ».

Alors plutôt que d’imaginer que nous pourrons nous en sauver, essayons d’abord d’y sauver la possibilité de notre présence continuée. C’est là tout le paradoxe ; c’est au moment où nous découvrons la banalité astrophysique de la Terre, que nous devons le plus penser son unicité relativement à nous »..(1)

(1) Extrait France Culture-Le monde selon Etienne Klein-La Terre ne se meut pas
http://www.franceculture.fr/emission-le-monde-selon-etienne-klein-la-terre-ne-se-meut-pas-2013-06-27
Edmund Husserl, La Terre ne se meut pas, Renversement de la doctrine copernicienne dans l’interprétation habituelle du monde, trad. de D. Franck, J.-F. Lavigne et D. Pradelle, Paris, Les Éditions de Minuit, coll. « Philosophie »,1989

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